La chronique de Xavier BOUTOLEAU

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Les chouettes

tyto alba

C’est au crépuscule que les oiseaux de nuit ou nyctalopes (qui voient la nuit) s’animent… L’hiver est même la meilleure saison pour entendre les rapaces nocturnes ; chuintement et hululement ne cessent de résonner lors des nuits glaciales sans vent. Il est bon de rappeler que la chouette n’est pas la femelle du hibou.La distinction repose sur la présence de petites plumes (aigrettes) sur la tête des hiboux.

Le village de Cazouls en héberge quelques uns toute l’année. La chouette effraie (tyto alba) , également nommée la dame blanche, est la plus facile à voir, notamment entre l’église et le château. Une petite ouverture en haut de la façade sud-ouest de celle-ci (laissée volontairement lors de sa réfection !) est d’ailleurs régulièrement utilisée par l’animal ; elle lui sert d’accès pour rejoindre son site de repos et de nidification au gré des saisons. Cette chouette au disque facial en forme de cœur passait, il y a peu de temps encore, pour un oiseau de mauvaise augure. Elle passait même pour l’annonciatrice de la mort, car, attirée par la lumière, elle avait la mauvaise habitude de chuinter sur le toit de la maison où se mourait un grand malade, seule maison éclairée du village.

strix aluco

Bien plus imposante, la chouette hulotte ou chat-huant (strix aluco) est aussi très facile à repérer grâce à son chant. Son hululement est sans aucun doute le plus connu de tous les chants nocturnes ; il fut le cri de ralliement des célèbres chouans. N’hésitez pas à vous promener le soir sur la rue de la Portette, vous pourrez ainsi apprécier ses vocalises ! Faites attention, elle est aussi virtuose qu’étonnante dans ses imitations d’autres oiseaux nocturnes … Localisant ses proies principalement à l’ouïe, elle chasse surtout à l’affût, perchée sur une branche basse. Son régime, très éclectique parfois insolite, varie selon les saisons et les milieux où elle vit. Bien que les rongeurs et les oiseaux constituent l’essentiel de sa nourriture, cette sédentaire peut s’intéresser à des animaux insolites : vers de terre par temps humide, chauve-souris, poissons, crapauds, écrevisses, belettes, taupes … De constitution robuste, elle est capable de s’adapter selon les ressources. Elle supporte les hivers rigoureux mieux que la chouette effraie ; un jeûne de 3 ou 4 jours lui pose peu de problèmes. Ainsi son opportunisme, de même qu’il lui assure les meilleurs chances de survie, lui permet d’atteindre un âge respectable d’environ une dizaine d’années. Et même si la mortalité des jeunes est importante (60 à 70 % n’atteignent pas la 1ère année), l’espèce n’est pas en danger.

Le hibou petit duc, expert ès camouflage

C'est au printemps que revient Otus Scops, littéralement l'oiseau de nuit pourvu d'oreilles qui regarde avec attention. Le plus petit hibou d'Europe est également le seul hibou vraiment migrateur qui effectue un voyage de plusieurs milliers de kms pour se reproduire chez nous. Bien qu'il ne dédaigne pas quelques lézards, mulots … sa nourriture préférée reste les insectes qui composent l'essentiel de son menu. Principalement actif la nuit, il demeure invisible le jour, ressemblant à un bout d'écorce collé près d'un tronc. Chassant le plus souvent à l'affût, on peut l'apercevoir au cœur même du village sur les fils électriques, près des lampadaires qui attirent de nombreux papillons ; mais c'est son chant très reconnaissable qui reste le meilleur moyen de le repérer.
En effet depuis mars, vous pouvez l'entendre la nuit égrener inlassablement ses "thiou" brefs et flûtés. Comme beaucoup d'oiseaux insectivores, le "Tcho't" souffre dans beaucoup d'endroits de la raréfaction ou de l'empoisonnement de ses proies ; mais aussi de la compétition souvent rude avec les étourneaux, les choucas … pour les sites de nidification (cavités…) eux aussi moins nombreux.

Le guêpier, l'oiseau arc-en-ciel

Après avoir passé près des deux tiers de l’année en Afrique, ce chasseur d’insectes vient animer nos paysages de ses vols très acrobatiques. Ce parent de la huppe et du martin pêcheur est l’un des oiseaux les plus colorés de notre plaine viticole.
C’est à la fin avril début mai que des colonies d’une douzaine d’individus recherchent des sites de reproduction ; leur choix se portera généralement sur des falaises meubles et sableuses telles que les berges limoneuses des rivières, les talus meubles des vignobles, fossés au bord des routes … près de lieux riches en insectes.
S’il ne s’est pas contenté d’aménager une galerie abandonnée, chaque couple creusera en trois semaines un nouveau nid prenant la forme d’un tunnel pouvant dépassé un mètre de profondeur . La face interne de la digue qui entoure Cazouls est d’ailleurs potentiellement très intéressante pour les guêpiers, mais la surface en herbe qui la recouvre semble malheureusement trop dense pour l’établissement d’une colonie.
N’hésitez pas à vous promener vers le sud du village, vous les verrez régulièrement chasser les insectes en plein vol…
Ce mangeur d’abeilles se nourrit également de nombreuses autres bestioles selon les saisons telles que les cigales, les libellules … Les insectes venimeux ou trop coriaces seront frappés brutalement sur un perchoir avant d’être avalés. Comme le petit duc, notre hibou local estival, le guêpier rejettera les parties non digérées sous forme de pelotes remplies de carapaces …
Avec la fin de l’été, l’abondance des gros insectes s’estompe et le mois d’août amorcera leur retour vers l’Afrique équatoriale.

La huppe fasciée, l’oiseau papillon

La huppe ne passe pas inaperçue. Avec son chant caractéristique : houp – houp – houp et son vol onduleux qui anime ses ailes noires et blanches, on ne peut se tromper. Ayant un régime insectivore, cette amie du soleil nous est donc revenue au printemps après un hivernage au sud du Sahara.
A l’instar de ses cousins qui possèdent un plumage éclatant (Martin pêcheur, rollier, guêpier), la huppe niche dans des cavités naturelle ou artificielles. Les vieux murs des mazets ou des maisons sont ses lieux de prédilection. Pour mieux se protéger au fond de leur trou, les jeunes vont dégager une odeur caractéristique propre à décourager les prédateurs.
Celle-ci, qui provient d’une glande du croupion, est aussi secrétée par la femelle qui couve. Et si ça ne suffit pas, les oisillons peuvent également projeter leurs excréments liquides avec une grande précision pour se débarrasser d’un intrus ! Attention aux observations trop rapprochées !
Les haies et les vieux arbres autour de Cazouls sont de bons lieux d’observation de ce "zèbre volant" … A vos jumelles !

La couleuvre de Montpellier ("Le TGV des garrigues")

Exceptionnelle à bien des égards, la couleuvre de Montpellier (malpolon monspessulanus) est l'une des espèces d'origine africaine à être présente de façon naturelle en France. C'est aussi la plus grande couleuvre de France ! Certains mâles peuvent dépasser 1,80 m tandis que que les femelles ont des tailles plus modestes. Ce serpent rapide et opportuniste se retrouve sur tout le pourtour méditerranéen à l'exception de l'Italie et des grandes îles méditerranéennes. Malgré sa mine patibulaire due à ses "sourcils prononcés", le "gisclard" (terme occitan : qui souffle violemment) n'est pas dangereux pour l'homme.
Unique couleuvre venimeuse de France, elle possède des "crochets à venin" situés en arrière. Mais, contrairement à la vipère, elle ne peut l'inoculer directement. En effet, ceux-ci ne sont pas des crochets perforés mais bien des dents avec des sillons le long desquels peut s'écouler le liquide. Ceci ne peut se réaliser que si la proie est maintenue dans la gueule, puis en quelque sorte " mastiquée " afin que les dents puissent pénétrer et le venin s'introduire ; celui-ci paralyse ainsi progressivement la victime et facilite son ingestion. Grande chasseresse au régime très varié, elle se nourrit de lézards, de rats, de vipères (quand il y en a), et peut également engloutir ses congénères !

Cependant, le caractère unique de ce serpent vient avant tout de son "comportement frotteur et marqueur" utilisé pour la chasse et la vie sociale. Ce dernier consiste en un mouvement alternatif des "narines" sur le ventre afin d'appliquer un liquide devenant incolore en séchant. Celui-ci se déposera ensuite sous forme de particules sur le sol lors de son déplacement. Des pistes de chasse seront ainsi marquées et favoriseront des pérégrinations éloignées.
Entre mai et juin, les surprises commencent ! Les couples se forment … Le couple dit dominant peut accueillir d'autres individus mâles ou femelles voire même d'autres couples sur son territoire. Les relations peuvent alors devenir très complexes. Comme pour les pistes de chasse, le mâle dominant va délimiter régulièrement son territoire. En son absence, son rôle pourra même être tenu par un mâle "vassal" qu'il aura pris soin de marquer au préalable de son fluide nasal. Ce dernier protègera la femelle sans pour autant s'accoupler avec elle (fabuleux, non ?!). A cette époque, le mâle reproducteur se montre alors très tendre envers la femelle qu'il défend et assiste même pendant la chasse ! Mais c'est aussi à cette période que les mâles d'un naturel très farouche oublient leur prudence… N'hésitant pas à passer à découvert, ils sont les victimes nombreuses et toutes désignées des routes passagères. Si la chance leur sourit, les jeunes nés fin août début septembre pourront espérer vivre une quinzaine d'années !

Les cigales, ventriloques méditerranéens

La France compte actuellement une vingtaine d'espèces dont trois corses (Cazouls en compte trois sûr …). Hormis les montagnardes, toutes appartiennent au milieu méditerranéen, bien que certaines d'entre elles remontent aujourd'hui de plus en plus vers le nord (il y a eu une mention en Bretagne dans les années 2000 !). Les cigales font partie de la famille des pucerons suceurs de sève et chaque espèce possède un chant qui lui est propre. C'est ainsi qu'en juin, lorsque la température journalière atteint les 22-25 degrés, les mâles commencent à "cymbaliser". A la différence des autres insectes "chanteurs" qui utilisent différentes parties de leur corps (pattes et/ou ailes…), les cigales possèdent un appareil spécialement conçu pour moduler ce "craquètement". Ces insectes ne vivront à l'air libre que deux à trois semaines environ après avoir passer plusieurs années sous terre à creuser des galeries !

Les durs au corps mou

Les escargots, faciles à observer, révèlent leur vie incroyable à qui s’y intéresse.

Hermaphrodisme
A la fois mâle et femelle, les escargots ne peuvent se féconder eux-mêmes, sauf exception. Durant l’accouplement, les partenaires s’échangent leurs spermatozoïdes dans de petits sacs prévus à cet effet ; les ovules produits par chacun d’eux seront alors fécondés par les spermatozoïdes de l’autre.
Un os en dard d’amour
Les escargots possèdent à l’intérieur du corps un os en forme d’aiguille, propre à chaque espèce. Les partenaires s’enfoncent mutuellement ce "dard" recouvert d’hormones durant l’accouplement.

Une bave formidable
Actifs quand l’humidité est importante, nos mollusques se déplacent uniquement vers l’avant grâce à un pied ventral qui se contracte et s’allonge. Celui-ci sécrète un mucus (la « bave ») qui leur permet d’avancer en glissant sur tous types de surfaces et d’adhérer sans problèmes aux parois verticales.
Recette de grand-mère
Saupoudrez un escargot de sucre, et celui-ci bavera… La bave du Petit gris (additionnée d’un peu de lait !) était autrefois utilisée comme remède contre la toux. En effet, la bave d’escargot contient un principe actif antitussif qui entre toujours dans la composition de sirops vendus en pharmacie.

Pas de gaspillage
La production importante de mucus nécessaire à son déplacement et la perméabilité de sa peau peuvent mettre l’escargot en danger. Pour résister à une déshydratation fatale, il est capable de stocker une réserve d’eau dans son poumon et même, si nécessaire, recycler l’eau de son urine et de ses excréments.
Odorat et toucher avant tout
Même s’il ne voit quasiment rien, l’escargot peut retrouver sa nourriture, ses congénères ou son lieu de repos de la veille grâce à des organes olfactifs extrêmement sensibles situés sur ses quatre tentacules.

Anecdotes

Calcium, un élément essentiel
Le sang des escargots contient 3 fois plus de calcium que nous.
Bébé Cannibale
Leur besoin en calcium est tel que les tout jeunes escargots n’hésitent pas à "boulotter" les coquilles de leurs frères et leur contenu pour grandir le plus vite possible.

Ca repousse
Si par malheur un escargot se fait couper les tentacules, ceux-ci repoussent à l’identique, yeux et organes olfactifs compris.
10 à 15 heures
C’est parfois la durée de l’accouplement des escargots. Chez eux, tout se fait toujours tranquillement …
2 à 4 secondes
C’est le temps nécessaire à l’escargot pour se recroqueviller à l’intérieur de sa coquille grâce à un muscle géant ; il lui faut 15 à 25 secondes pour ressortir totalement.

Le silure, "géant des eaux douces"

De nombreuses espèces de poissons ont été introduites dans nos rivières que ce soit pour le loisir de la pêche, par curiosité scientifique, pour la lutte biologique, l’aquaculture ou encore par accident. Certaines se sont acclimatées, d’autres non ; si bien qu’en France, elles représentent aujourd’hui près du tiers des nos poissons lacustres ! Sur les 35 espèces introduites, la moitié provient d’Amérique du Nord, un tiers d’Europe centrale et le reste d’Asie.
Le silure en est le plus gros représentant dans le fleuve Hérault avec des tailles avoisinant les 2,40 m et un poids dépassant les 80 kg. Impopulaire, ce "croquemort des rivières" est affublé de toutes sortes d’histoires et rumeurs souvent excessives et rarement justifiées. Tout comme le brochet, ce prédateur joue un rôle régulateur et de "police sanitaire" en réduisant les risques d’épidémie par l’élimination des cadavres d’autres poissons.
La réalité est parfois difficile à établir quant à son impact sur l’environnement piscicole. Cependant, la présence de nombreux seuils qui segmentent le cours inférieur du fleuve laissent penser que la présence multiple et cloisonnée de gros individus sur un milieu restreint à un effet sur les populations des autres poissons. Généralement peu actifs la journée, ils peuvent parfois se rassembler en impressionnante et curieuse assemblée ! Les eaux du barrage en hébergent d’ailleurs quelques beaux spécimens…

Le sanglier

Rare au début du siècle et jusque dans les années 1950, le sanglier est devenu aujourd’hui une espèce très commune. La déprise agricole et la progression forestière, l’absence de prédateurs naturels et bien d’autres facteurs ont favorisé son expansion et sa multiplication sur l’ensemble du territoire héraultais. Pourtant, malgré son abondance, son caractère imposant (deuxième plus gros mammifère terrestre du dé partement) et ses mœurs plutôt nocturnes, accentuées par la chasse intensive, la bête noire reste très discrète.
Les sangliers vivent en "compagnie" menée par une femelle expérimentée que tous les individus suivent sans grogner. Le groupe rassemble différentes mères, sœurs, tantes, cousines, enfants petits enfants, neveux et nièces… Les mâles, eux, mènent une vie indépendante et plutôt volage qui correspond bien au nom de sanglier (de "singularis" : solitaire).
Après une forte augmentation des prélèvements entre 1990 et la saison 2002-2003 où 17000 sangliers ont été abattus dans l’Hérault, la tendance semble aujourd’hui se stabiliser voire s’inverser quelque peu : 17900 en 2007-2008 / 16600 en 2008-2009 / 12500 en 2009-2010. A ce jour aucun indicateur ne permet d’estimer le nombre de sangliers dans le département. Il est donc difficile de déterminer précisément l’effectif à gérer pour contenir le développement de la population et ainsi maîtriser les dégâts aux cultures ou réduire le montant des indemnisations (plus de 300 000 euros en 2008-2009).

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